Surréalisme : « automatisme psychique pur, par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. » - André Breton, premier Manifeste du surréalisme, 15 octobre 1924.
Le centre Pompidou présente actuellement une exposition dédiée au surréalisme. Elle rend hommage au centenaire de ce mouvement artistique, né en 1924 avec la publication du premier Manifeste du surréalisme d’André Breton. Prenant pour point de départ cette date symbolique, elle revient à des principes fondateurs du surréalisme : briser les codes et faire appel aux rêves et à l’imaginaire. Cette exposition regroupe près de 500 œuvres, dont le nombre et la diversité témoignent de la transversalité artistique de ce mouvement, qui s’exprime par des supports aussi variés que la peinture, la poésie, le cinéma, le dessin, la photographie, etc.
L’exposition a été imaginée en s’inspirant des précédentes expositions surréalistes, ayant eu lieu en 1938 puis en 1942, et s’inscrit ainsi dans la lignée de ces expositions emblématiques. Elle rassemble des figures emblématiques comme Dali, Magritte, Max Ernst et André Breton. Le parcours de l’exposition se veut onirique, prenant la forme d’un labyrinthe avec un parcours à la fois thématique et chronologique, et faisant même appel à un magicien pour créer l’entrée. Ainsi, le spectateur est pris dans un monde de rêve, de couleur et de surprise.
L’exposition est articulée autour de quatorze thèmes. Ceux-ci montrent l’influence de la littérature, et notamment de la poésie, sur l’art pictural, en reprenant des thèmes poétiques qui rythment l’exposition tels que le rêve, l’éros, la forêt, la pierre philosophale, le cosmos, la nuit, etc. Au cours de son cheminement, le spectateur est ainsi aspiré dans le monde des rêves et se perd dans un labyrinthe gorgé d’œuvres oniriques et surréalistes façonnées par de multiples influences. Participant à la mise en place de ce labyrinthe fait de rêves, de mystères et d’imaginaire, les installations sont parfois cachées ou placées tout en haut des murs.
Cette œuvre est l’une des dernières de Dali. Pour la réaliser, il s’inspire des théories de Sigmund Freud et notamment l’ouvrage L’interprétation des rêves, dans lequel ce dernier développe la théorie selon laquelle l’environnement réel est transformé en un univers surréaliste lorsqu’une personne rêve. Ici, Dali s’inspire de cette idée : Gala entend le bourdonnement d’une abeille lors de son sommeil, ce qui provoque un rêve dans lequel elle reçoit une piqûre, associée sur la toile au fusil-baïonnette.
On trouve dans l’art surréaliste une ouverture des possibilités visuelles, avec l’utilisation d’images fragmentées, déformées... À travers ces expérimentations formelles, l’art devient un moyen d’évasion, qui va de pair avec une réflexion sur la perception du monde réel. C’est donc une critique de la rationalité, formatée au sein d’une pensée travaillée par les évolutions constantes de la science, de la psychologie, etc.
Contrairement aux précédentes expositions surréalistes, celle-ci s’ouvre à la présence des artistes féminines : on trouve donc le travail de Leonora Carrington ou encore Dora Maar. Extraite d’un regard uniquement masculin, l’exposition aborde ainsi ce mouvement avec plus de justesse. Elle évoque également l’ambivalence de la figure féminine, tiraillée entre la perception de la femme comme objet de désir d’une part, et la vision nouvelle qui en est donnée d’autre part par l’apport créatif des femmes elles-mêmes, qui ont su s’imposer dans un milieu dominé par les hommes.
Main-coquillage est une œuvre surréaliste et un photomontage onirique réalisé en 1934. Dora Maar rejoint le groupe surréaliste en 1933 ; elle partage le goût artistique des surréalistes ainsi que leur engagement politique, notamment contre le fascisme. Ce montage semble réaliste, pourtant il fixe une image issue du rêve, de l’imaginaire ; il parvient à égarer le spectateur, ce qui en fait une œuvre surréaliste.
Par ailleurs, l’exposition est alimentée par de nombreux documents d’époque. Elle montre l’engagement politique des artistes, notamment concernant le colonialisme ou encore les horreurs de la guerre. L’art surréaliste est donc, à ce titre, une arme de résistance qui retranscrit pleinement les bouleversements politiques de l’époque.
Cet ange est en réalité un démon : furieux et destructeur, il suscite peur et horreur. Il prend la forme d’un monstre anthropomorphe mi-humain mi-oiseau, avec des griffes et des dents. Ernst rapporte l’avoir réalisé après la défaite des Républicains en Espagne : ce monstre chimérique est une allégorie du franquisme et présage les nombreux bouleversements et massacres à venir.
« Surréalisme. L’exposition du centenaire » est ainsi l’occasion d’explorer la profondeur des rêves et de l’inconscient en retraçant l’histoire d’un mouvement artistique majeur du XXe siècle, qui continue d’influencer les productions artistiques de nos jours.
Par Emmie PINTARD, chargée de communication pour le mandat 2024-2025.